Finalement, l’ennemi terroriste n°1 des Etats-Unis d’Amérique et de l’Occident en général a été tué. Toutes les autorités occidentales jubilent, et on ne saurait en être surpris. Il a été abattu, comme il se doit au Pakistan, parait-il dans un lieu situé près d’une caserne de l’armée de ce pays…. Cet épilogue me parait plutôt banal vu ce qu’on savait déjà de la situation pakistanaise et vu les moyens officiellement engagés par les Etats-Unis depuis quelques années pour se débarrasser – dead or alive! – du bonhomme. Du coup, face à tant de banalités que les médias en fassent un tel blabla depuis ce matin m’énerverait plutôt. Et nos scribouillards de retracer en effet sa « carrière », sa « traque », et bien sûr de soupeser à l’aide d’experts (plus ou moins sérieux) les conséquences de cet « événement ». Eh bien non, ma brave dame, le terrorisme (islamiste) ne va pas s’arrêter d’un coup de ce fait, mais cela va tout de même leur porter un coup au moral à ces méchants de terroristes (islamistes) et ils vont chercher à se venger. (Y a-t-il seulement un seul être pensant sur la planète qui puisse sérieusement s’être posé la question à laquelle on somme les experts de répondre?) Passionnant, vraiment passionnant. Il faut bien meubler, s’exciter, se congratuler, etc. C’est presque aussi pénible que le mariage princier britannique, qui restera sans doute comme un des sommets du néant médiatique de notre temps. Pourquoi les journalistes confondent-ils à ce point le quantitatif et le qualitatif ?
Pour moi, tout cela n’est que du remplissage – car, s’il existe (ce qui est bien possible) des arrières-plans cachés à cette affaire Ben Laden et des conséquences pour le coup bien réelles à ce décès, on ne les connaitra que dans quelque temps, voire dans quelques décennies. Contentons-nous donc de la simple information sans plus. Et occupons-nous d’autres sujets qui méritent plus d’informations et d’analyses.
Certes. Mais tout de même : mettre sur un pied d’égalité le mariage princier et la mort de Ben Laden, ce ne serait pas un peu excessif ? D’autant que, du point de vue des réactions médiatiques, il semble que, au-delà de l’aspect quantitatif, les différences qualitatives apparaissent assez vite, notamment sur la théorie du complot (« ils » l’ont assassiné, « ils » ne voulaient pas qu’il parle, il en savait trop, etc.). Ceci dit, il est sans doute vrai que la disparition physique de OBL soit une bonne chose pour les Américains, mais la question que je me pose est la suivante : la préférence pour une option définitive (ou disons sa variante minimaliste : on ne prend aucun risque, et s’il cligne un oeil, feu à volonté) ne doit-elle pas être vue comme la conséquence indirecte des excès de l’emprise juridico-médiatico-humanitaire qui exige un procès en bonne et due forme ? Ce qui signifie : on est parti pour 10 ans de procès, tout en offrant une tribune inespérée au méchant. A Nuremberg, on avait su être efficace ; à La Haye ou à Kigali, bof.
@ Vincent : j’exagérais un peu certes… et, au bout de deux, trois jours, les informations ont commencé à être plus dignes d’attention. Ne serait-ce que parce que les autorités pakistanaises sont du coup sommés de faire quelque chose?
Par ailleurs, je suis d’accord : OBL mort et submergé est bien moins embêtant pour les Etats-Unis qu’un leader en prison, ayant l’occasion de faire de son procès une tribune, ou qu’un leader vieilli et usé, mourant bêtement de maladie en prison avant même le verdict définitif . Plus généralement, en dehors de cette histoire de procès, notre monde occidental est marqué par une étonnante perte d’efficacité dans certains domaines. (Bon, en même temps, on n’a pas encore atteint partout le stade du procès à l’italienne… dix ans d’audiences, et la prescription de toute façon à la fin…)