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Vallée sociale du 18 janvier

Je ne sais pas qui conseille actuellement le chef de l’État, mais ces deux dernières semaines n’ont pas été un modèle en matière de communication politique. Je dois dire que je suis même étonné à quel point tout cela tient du cafouillage permanent, qui se passe presque de commentaires.

Passons sur la perte du « Triple AAA », amplement analysée de Brest à Vladivostok comme un désastre politique pour l’exécutif français, ou sur l’affaire Seafrance, un modèle de communication de crise ratée, mais revenons sur le « Sommet social du 18 janvier ». Soit disant selon la communication de l’exécutif avant Noël, ce moment devait marquer une modification radicale de la politique de l’emploi en France, un « grand soir », une « aube nouvelle », un « nouveau départ ». Certains (à gauche) craignaient le pire. Finalement, l’exécutif a annoncé un plan, chiffré à un demi-milliard d’euros, qui ne comporte que la resucée de mesures déjà expérimentées depuis 25 ans au moins dans ce pays avec le succès que l’on sait, et, pour certaines, à peine abandonnées il y a un an. Il est vrai que N. Sarkozy se réserve des annonces plus corsées pour fin janvier (TVA sociale par exemple), mais il reste que le sommet social du 18 janvier en est devenu du coup une bien morne vallée.

Quand j’ai lu le détail de ces mesures, je suis en effet un peu tombé de ma chaise. Étant donné les délais légaux, administratifs, de mise en œuvre, de tout ce fatras, l’exécutif pourra s’estimer heureux s’il trouve quelques rares chômeurs ayant retrouvé du travail, ou entrepris une formation, grâce à ces dispositifs, qu’il pourra exhiber dans les médias avant le premier tour de la Présidentielle. Pour ce qui est des chiffres globaux et surtout du vécu de nos concitoyens face au chômage, ces mesures n’auront aucun effet. Elles auront peut-être même un effet contre-productif, dans la mesure où elles montrent à toute personne qui y réfléchit cinq minutes qu’on recourt toujours aux mêmes vieilles recettes (exonérations de charges) et que cela ne marche(ra) pas. (Je croyais d’ailleurs qu’il fallait réduire les niches fiscales…) Le chômage restera la préoccupation n°1. Je suis particulièrement sensible (par ma profession) au thème de la formation des chômeurs. Toute personne ayant été au chômage ou ayant eu un proche au chômage sait très bien que saisir l’occasion de cette oisiveté forcée pour se former ne va pas du tout de soi dans notre pays. Seul un chômeur avec une motivation en béton et des nerfs d’acier réussira à se former. Est-il besoin que l’exécutif fasse mine de découvrir  cette lacune béante à trois mois des élections et après cinq dix ans de pouvoir? Proposer 16000 places de formation supplémentaires, quelle personne censée pourrait critiquer cette mesure? Mais est-ce qu’au point où nous en sommes, il ne faudrait pas multiplier par un facteur 10 l’augmentation de l’effort qu’on se propose?

Dans le même ordre d’idée, l’exécutif annonce des mesures fortes sur le logement. A moins de donner les pleins pouvoirs de la République à quelque association genre DAL (Droit au Logement), là encore, les mesures, fussent-elles des plus raisonnables, qu’annoncera l’exécutif ne serviront qu’à souligner avec force l’échec du gouvernement dans ce domaine.

Je comprends fort bien que l’exécutif veuille faire mine de résoudre in extremis les problèmes qu’il n’a pas réussi à affronter avec succès pendant les années précédentes, mais se rend-il compte du point auquel cela souligne qu’un temps précieux a ainsi été perdu? Cela me fait irrésistiblement penser à l’étudiant qui n’a rien fait du semestre et qui révise le cours en catastrophe sur les notes prises par d’autres entre minuit et six heures du matin avant l’examen.

Si la campagne de N. Sarkozy continue dans ce style (« Je vais faire d’ici avril 2012, tout ce que j’aurais dû faire depuis mai 2007. »), on devrait bientôt voir des députés UMP et Nouveau Centre découvrir des vertus à ce cher François Bayrou.